La petite  HistoireAlbeRT Dastre (1844-1917)

 

Cette note a pour but d’essayer de compenser un manque dans les cartes postales anciennes d’Ermont : en effet, il n’existe pas (à ma connaissance) de carte représentant la belle propriété près de la Gare d’Ermont-Halte, ayant appartenu à Albert Dastre, professeur de physiologie et maire de la commune.

Le professeur Albert Dastre

 

 

Albert-Jules-Franck Dastre est né à Paris en 1844, il obtient ses premiers diplômes supérieurs en 1866 (licences de mathématiques et de physique) et 1867 (agrégation en sciences physiques) avant de se diriger vers les sciences naturelles (licence en 1869). Il part ensuite à l’armée entre 1870 et 1871 sous le grade d’aide-major auxiliaire. De retour à la vie civile, il se remet aux études pour obtenir en 1876 un doctorat en sciences naturelles et enfin, devient docteur en médecine (1879)*1.

 

 

Un cours du Pr. Dastre à la Sorbonne © BIUSanté

 

 

Parallèlement, il commence sa carrière dans la recherche et l’enseignement, il est d’abord l’élève et le préparateur de Claude Bernard*2 (jusqu’en 1876) puis celui de Paul Bert dont il devient le professeur suppléant à la chaire de physiologie de la Faculté des sciences de Paris. En 1879, il devient maître de conférence en anatomie avant de devenir professeur titulaire de physiologie en 1887.

 

 

Ses travaux de recherches seront souvent couronnés de succès, dans des domaines très pointus comme les vasomoteurs, les anesthésiques, le foie ou encore le vieillissement des cellules. Il en tirera de nombreuses publications, reconnues par la profession. Son dernier ouvrage La vie et la mort (1903) associera philosophie et physiologie montrant sa façon d’aborder la science.

J’e ne possède pas d’information sur la venue à Ermont d’Albert Dastre : ni sa date d’arrivée, ni les motifs qui vont conduire cet illustre professeur à venir s’installer dans notre commune. Mais toujours est-il qu’il s’y sent suffisamment chez lui pour s’engager en politique. Il se présente aux élections municipales de 1900 contre le maire sortant, Edouard-Nicolas Godart. Le premier tour a lieu le 6 mai pour le renouvellement intégral des 16 conseillers municipaux : 13 furent élus et 3 autres au second tour, le 13 mai. L’élection du maire se fait le 20 mai et Albert Dastre est élu. Il sera reconduit pour quatre ans en 1904*3.

 

Sur la droite, le portail de la propriété du Pr. Dastre

 

 

Il a élu domicile dans un petit château dont la construction, par l’architecte Jules de la Morandière*4, remonterait à 1840*5. Ce dernier se situe un peu à l’écart du centre-ville, le long de la chaussée Jules César (rue de la Station à l’époque, terrain actuellement compris entre les rues Jean-Jacques Rousseau et de la République).

 

 

Comme évoqué en introduction, seule l’entrée de la propriété semble avoir été éditée en carte postale, peut-être un refus du propriétaire ? Ou les arbres abondants à l’époque ont-ils masqué aux yeux des photographes l’intérêt du lieu ? Quoiqu’il en soit, se rendre compte de son aspect d’origine nous est cependant permis grâce à un recueil d’architecture publié en 1877*6.

Façade sud ©Gallica
 
Façade nord ©Gallica

 

Paradoxalement, si de nombreux bâtiments représentés sur les cartes postales ont disparu sous l’avancement constant de l’urbanisation, ce ne fut pas le cas du château d’Albert Dastre. Certes, son parc fut amputé*7 par la construction de la résidence Bizet, certes sa façade nord a été modifiée, mais cette belle demeure est toujours là, précieux témoignage d’une époque révolue.

Vue aérienne de la propriété ©Google Maps
 
Vue de la Rue de la République ©Google Maps

Le professeur Dastre a soixante-treize ans lorsque, sortant de l’Académie des sciences, il est renversé par un camion militaire : il mourra des suites de ses blessures le 22 octobre 1917. Dans sa nécrologie on pouvait lire : « L’œuvre de Dastre est une de celles qui ont pâti le moins des épreuves du temps. Elle contient une série de pages glorieuses pour la Physiologie française et a contribué grandement à maintenir celle-ci au premier rang »*8. En hommage, la Rue des Etangs*9 à Ermont sera alors renommée Rue du Professeur Dastre.

 

 
Surmoulage du buste © Topic-Topos
 

Anecdote : Le buste d’Albert Dastre


Quelques années après sa mort, un comité se crée pour réaliser par souscription publique, un buste à sa mémoire. Le sculpteur Julien Prosper Legastelois le réalise vers 1926*10. Mais ce buste ne sera que très peu vu… suite aux lenteurs de la municipalité de l’époque (Camille Clément alors maire, n’est pas du même bord politique qu’Albert Dastre) et malgré les réclamations diverses, il faut attendre 1935 pour qu’enfin la décision soit prise : le buste sera installé dans l’école des garçons. Il n’y resta que quelques années  car lors de l’occupation allemande, le buste fait de bronze fut emmené pour être fondu… les efforts de la commune pour le récupérer ne permirent que l’autorisation d’en faire un moulage avant sa disparition*11.

 

 

 

 

 

 

 

Notes

*1 Source : Exposé des titres et travaux scientifiques d’Albert Dastre, 1894
*2 Pour le détail de leur collaboration : Les élèves de Claude Bernard, par Jean-Gaël Barbara, La lettre des neurosciences n°42, 2012
*3 Source : Ermont – De la révolution à nos jours, par André Vaquier, 1970
*4 Biographie sur Wikipédia
*5 Date mentionnée par Jacques Delaplace : Ermont ne s'est pas fait en un jour, 1977
*6 L’architecture pittoresque au XIXe siècle, par Léon De Vesly, 1877
*7 Sans doute d’ailleurs très précocement à cause de l’ouverture de la ligne de chemin de fer vers Valmondois en 1876
*8 Source : revue Paris-médical n°26,  par P. Carnot, 1917
*9 Cette ancienne dénomination rappelait la présence proche de l’ancien étang d’Ermont (voir l’article sur le lavoir d’Ermont)
*10 D’après Wikipédia, Legastelois présenta le buste cette année là au Salon des artistes français 
*11 Source : Ermont – De la révolution à nos jours, par André Vaquier, 1970

 

(Cet article n’engage que son auteur et peut être amené à évoluer. Version : 02/03/2013)

Article téléchargeable en PDF

 

 

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